Les sociétés réalisent et produisent de nombreux rituels dont la fonction est d’assurer leur régénération et/ou leur perpétuation.
On doit considérer les rituels non pas seulement sous l’angle de leur efficacité symbolique, mais également comme un discours que la société tient sur elle-même. Le rituel articule en effet des actes, des paroles et des représentations de notre environnement. La réalisation du rite s’insère généralement lors d’une cérémonie appelé rituel. Celui-ci comprend un temps de préparation qui conditionne la réussite du rite proprement dit. Le rite, une fois accompli, clôt ainsi le temps rituel ou culturel. Le rituel est souvent associé à un rite religieux consacré, habituel et conventionnel. Si l’on accepte la distinction rituel/rite, Il y a autant de rites que de rituels (souvent imbriqués l’un dans l’autre), peu importe leur origine « religieuse » ou « profane ».
Le rituel assure une fonction de transmission, d’harmonisation et de socialisation. Il ne s’improvise pas. Il est codifié, c’est le formalisme rituel. Il peut toutefois être modifié, adapté. Pourtant, certaines séquences seront toujours conservées pour qu’il signifie, pour qu’il soit efficace.
Chaque rituel présente de manière formelle une structure ternaire qui se décompose en 1) une phase de dissociation (d’avec son état antérieur), 2) une phase d’apprentissage, un temps interstitiel au cours duquel il n’est plus dans son état antérieur et pas encore dans le nouvel état à intégrer, 3) une phase d’intégration par laquelle l’individu entre alors dans son nouvel état. A chaque phase sont redéfinis le statut et le rôle de l’individu au sein de sa société et est ainsi fabriquée une « nouvelle personne ».
Qu’ils relèvent du religieux ou de la vie profane, les rituels ont une fonction de régulation en même temps que d’appartenance et apparaissent comme des stratégies de communication. Ils se caractérisent par la répétition de leur effectuation. Ils sont répétitifs, quotidiens (école, travail), hebdomadaires (dans la vie quotidienne ou le culte religieux), périodiques (anniversaire, festival), saisonniers (célébration du printemps), ou occasionnels (la cérémonie du mariage, la célébration de la quinceañera dans le monde latino-américain, etc.), sur le plan personnel, familial ou collectif. Ils peuvent se décomposer de différentes manières mais ils sont des rituels s’ils possèdent au moins un rite.
En adoptant cette approche, il n’en va pas autrement dans la vie quotidienne. Prenons l’exemple du repas familial (même si ce moment partagé tant à disparaître). Le repas familial qu’il soit quotidien ou hebdomadaire procède de la même dynamique rituelle. Il suppose une préparation, ne serait-ce que le temps consacré à l’achat des aliments, à leur préparation (souvent à la charge de l’épouse), à la distribution des places à table, au mode d’usage des outils (couverts), à l’heure retenue, etc…., ce qui procède d’un rituel. Il en va de même pour l’habillement. Selon que l’on va pratiquer une activité (qu’elle soit-elle), de sport ou de loisirs, on revêtira tel ou tel vêtement qui facilitera la pratique alors que si l’on se rend à une invitation, on utilisera d’autres vêtements ‘réservés’, d’une manière générale ils sont spécifiques à. l’acte à accomplir. Dans tous les cas, il y a une préparation, est-elle mentale. Ici encore, il s’agit de rituels. On pourrait prendre d’autres exemples dans la vie quotidienne comme les salutations, la manière de s’adresser à ses parents, ses grands-parents, à ceux de sa classe d’âge, jusqu’à disposer de son corps dans la manière de marcher (selon que l’on est pressé ou pas pour se rendre à l’école ou à son poste de travail, par exemple), etc…. Qu’ils soient profanes ou non, les rituels s’organisent en systèmes activés en fonction d’un certain découpage du temps propre à chaque groupe humain.
Article écrit par Jean-Pierre Goulard, Anthropologue.